J’ai toujours cru au pouvoir social de l’architecture, par ce que les
espaces créés pouvaient permettre. Il a toujours été important pour moi de
travailler sur des espaces capables, qui puissent par la suite être librement
utilisés par les futurs acteurs, directeurs, utilisateurs, quelque soient leur
projet (dans ce cas là, culturel). Je crois aux usages possibles dans un
espace, plus qu’aux fonctions définies.
Je ne crois pas que
concrètement, l’architecture puisse bouleverser des injustices.
Mais, j’ai appris avec
cet exercice qu’un bâtiment, sa forme et son image pouvait être aussi un objet
politique et polémique alors même que l’on ne sait pas ce qu’il s’y passera à
l’intérieur, et que le premier mur n’est construit.
L’identité Mizhahi comme facteur à la conception
du centre culturel
Pourquoi la question
d’identité, celle d’une communauté est-il devenu un facteur dans la conception
d’un projet architectural ? Cette approche nouvelle m’a hantée et guidée
pendant un semestre. Il était nouveau pour moi d’ajouter à mon travail de
conception, cette dimension là. Ainsi, il est devenu évident que les réponses
architecturales changent selon les commanditaires, le contexte politique.
En Israël, il est commun,
de savoir sur l’autre sa religion, ses origines, et bien plus encore, le pays
d’origine des parents, ses opinions politiques, et contre qui se positionne
t-il,… Le pays est neuf, construit continuellement sur des vagues de migration.
Chacun a son identité propre, et revendique plus ou moins son appartenance
d’origine. Le clivage est au début
géographique, puis devient social.
De ce constat et de nos
rencontres, plusieurs questions apparurent. De cet éclectisme culturel, y a
t-il une culture israélienne ? Qui décide ce qui est reconnu ou non comme
appartenant à cette culture ? C’est une question importante de
reconnaissance. Quelle image du pays est construite ?
Le pays se situe au
centre du Moyen-Orient. Géographiquement, historiquement, Israël est un pays
arabe. Cependant, le pays est construit et dirigé depuis sa création en 1948,
et même avant, par des institutions et mouvements juifs ashkénazes. Pourtant la
culture orientale du pays existe toujours, de part son patrimoine architectural
toujours visible, témoignant des siècles précédents, à domination arabe. De
plus, de nombreux arabes, musulmans ou chrétiens vivent encore en Israël, des
villages et villes entières. Cette population fait partie du pays et conserve
ses traditions, et sa culture.
Mais, si Israël est
toujours considéré comme pays juif, et qu’il n’est regardé que cette
communauté, il existe de nombreuses cultures, de pays d’origine. Par vagues de
migration, le pays accueille depuis sa création des juifs du monde entier, sans
les considérer à son égal (soit le modèle juif européen). Les Mizrahim, les juifs arabes, (c’est comme
un gros mot ici pour Israël), et leur culture ne font pas partie du
développement, et de la recherche actuelle d’une culture israélienne. Pourtant,
migrants comme tout le peuple juif d’Israël, ils sont attachés à cette terre,
et vivent ici.
Le pays est en guerre
depuis son indépendance contre les arabes palestiniens, mais aussi à plusieurs
reprises contre les pays arabes voisins. Ainsi, dans sa construction propre,
l’Etat se distance d’une quelconque culture arabe, et se crée alors une guerre
culturelle, sociale, identitaire interne.
Les débats vont plus
loin, et ainsi, au cours de nombreuses discussions, et débats, plusieurs fois
virulents, j’ai pu me demander si Israël était raciste.
La culture, l’art des
juifs d’Afrique noire et du Nord, et du Moyen-Orient ne faisait pas partie du
plan Israélien.
Après des injustices
sociales criantes à leurs arrivées dans l’état, cette communauté se bat pour sa
reconnaissance.
Ce centre culturel est devenue
une action politique.
La réponse urbaine proposée, la place comme lieu
d’acte citoyen
La parcelle s’articulera
autour d’une large place, ouverte sur la Minshar Art School (son bâtiment
moderne, mais aussi ses locaux dans l’ancienne gare de bus), et du nouveau
centre culturel. Cet espace public tourné sur Salomon street et Nave Sha’anan,
conserve les blocs en béton actuels, repères des anciennes plateformes de bus.
De petites salles d’activités, de studios peuvent être imaginés autour de ces
blocs. L’animation de la place est garantie par l’installation de mobiliers
publics, et le tracé de jardins et parcs. Ainsi, ce lieu est rendu ludique et
vivant, et permet de lier à la fois l’école et le centre culturel, mais aussi
le quartier résidentiel de Nave Sha’anan, et le futur quartier d’affaires au
nord de la parcelle. Il offre une respiration à une future ville très dense qui
n’offre que peu de vides publics.
De plus, il était
important pour moi, que le bâtiment et ses usages puissent s’étendre à
l’extérieur, accessible à tous et devienne un lieu d’acte citoyen. Ainsi, cette
place peut se transformer rapidement en lieu de rencontre, théâtre, lieu de
manifestation, création, réflexion, lieu de vente de produits, en marché. Les
enfants peuvent s’y retrouver et jouer, un passant peut apprendre grâce à une
exposition extérieure, un concert, ou des peintures. Un adolescent peut
participer à un atelier ouvert de construction ou création. Le quartier et ses
habitants pourront habiter la place, y montrer ce qu’ils sont, ce qu’ils font.
Grâce au climat chaud et
ensoleillé du Moyen-Orient, il était essentiel d’y ajouter un parc, et de
prévoir grâce à plusieurs bandes végétales et emplacements possibles des arbres
et espaces végétalisés, offrant une fraicheur nécessaire à ce lieu complétement
exposé sud-ouest.
Ainsi, bien que l’échelle
du bâtiment et de l’esplanade soit importante, il est nécessaire de retrouver
en ces lieux, l’essence du quartier, l’atmosphère d’un café populaire, ou d’une
rue piétonne, l’effervescence d’un marché, la liberté d’un mur à taguer.
Réponse architecturale, un lieu pour une
reconnaissance culturelle
J’ai été consciente,
malgré mes croyances en une architecture neutre, que l’image d’un bâtiment
public, (surtout au programme si important), renvoyait nécessairement à un
mouvement, une culture propre. Son impact dans la ville et auprès de ses
habitants est considérable. Chaque bâtiment-monument comme sera ce centre
culturel dit quelque chose, et renvoie en chacun une référence agréable,
positive ou non.
L’objectif, pour ce futur
centre culturel Mizrahi était de travailler sur un bâtiment-repère, un monument
important, dense, visible et ouvert dans la ville. Un bâtiment d’exposition,
affichant au passant son activité et son identité. Ainsi, un seul bâtiment
complexe, accueille tous les éléments du programme, travaillant sur plusieurs
niveaux, autour de l’élément le plus important : la salle de spectacle, de
600 sièges.
Après avoir analyser le
programme, je l‘ai séparé en deux parties, dégageant à la surface les éléments
ayant besoin de lumière, d’être accessible depuis le sol, mais aussi d’être
vus. Ce centre doit également faire le lien entre deux quartiers, deux
cultures, deux niveaux sociaux, mais aussi deux fonctions (résidentiel, et
tertiaire). Le bâtiment se situe sur la bande nord de la parcelle dans l’alignement
de HaSharon street et de Minshar school. Ainsi la perspective du boulevard Har
Tsiyon est prolongée, et dégagée. La différence de niveau entre Salomon et
HaSharon est importante (près de 5 mètres). Ainsi, il m’est paru important de
conserver une continuité entre ces deux niveaux, une liberté de circulation
dans le bâtiment pour joindre ces deux mondes, mais aussi une visibilité
continue. Lorsque, nous venons du nord (de HaSharon), la visibilité est totale
sur l’esplanade de Nave Sha’anan.
Le bâtiment pourrait se
diviser en deux principales fonctions : la fonction plus publique de
MONTRER, EXPOSER, SE PRODUIRE au niveau du sol et de l’accès double au centre
culturel (un vers Salomon, un sur HaSharon), et la fonction plus privée de
TRAVAILLER, PRODUIRE, REPETER, APPRENDRE, dans les derniers niveaux du lieu.
Ainsi, la division est verticale, et permet d’avoir au niveau du sol et dans
les premiers niveaux, une continuation de la place extérieure publique
avec la cafétéria, l’espace d’exposition, les accès aux auditoriums, la
boutique, le foyer, etc. De plus, un large passage intérieur lie les deux
entrées, sous forme d’escalier (amphithéâtre) et deviens un espace de
circulation habitable libre.
Ainsi, le centre culturel
s’apparente à la culture Mizhahi, par son usage, son organisation qui permet une
lisibilité, et reconnaissance permanente de ce qu’il s’y crée à l’intérieur et
à l’extérieur. L’art exposé doit pouvoir s’afficher, briller, et être reconnu
comme tel. Mais la culture Mizhahi est pour moi aussi une lutte, un processus
de reconnaissance au travail : et cette action doit pouvoir s’exprimer et
se voir. Ma position n’a pas été d’identifier cette identité dans
l’architecture physique du lieu, mais plus dans ce que les espaces peuvent
permettre. Il faut que ce centre culturel soit comme une expérience en cours,
dans laquelle les manières d’exposer, de créer se développent. Car, les espaces
d’exposition aujourd’hui sont attachés à un modèle complétement européen
(Ashkénazi), et doivent permettre à la culture Mizrahi de s’épanouir dans un
nouveau modèle, son propre modèle. Le bâtiment dans son image, est accessible
par tous, par ses principales façades en verre, et sa rigidité et sa volonté de
simplicité dans sa forme, pour une possible identification Mizhahi par la
suite. Les matériaux et l’enveloppe générale ne renvoient pas à une appartenance
orientale, ou arabe ; qui aurait permis facilement d’envelopper le
problème.
Je regrette que dans mon
processus de conception, de ne pas avoir développer plus précisément chaque
fonctions et usages possibles du lieu, en réponse aux problématiques
identitaires Mizhahi. Mais, grâce aux différentes rencontres entre le studio et
Achoti house, j’ai aussi compris que l’idée de la création d’un centre culturel
était nécessaire dans sa symbolique, et non réellement dans son design, par sa
localisation si centrale dans Tel-Aviv, mais aussi dans Nave Sha’anan. Ce lieu
pourrait permettre d’accueillir des populations très variées, des populations
du nord, mais aussi du quartier. Il pourrait permettre de redonner une identité
nouvelle au quartier, proche de ses origines.
Il est l’accomplissement
d’un combat de reconnaissance, d’existence, mais aussi social.
the black city against the white city, which in-between ? |
to keep the old central bus station on the future urban plan |
how to gather ? |
vertical program organisation, to get close of the ground |
a monument |
open area |
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